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Blog sur l'actualité d'Olivier Jornot
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9 novembre 2008

87] Michel Halpérin : Côté Cour

PORTRAIT

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Du droit à la politique, du rôle de ténor du Barreau à celui de Pater familias, Michel Halpérin sait tout embrasser sans mal étreindre.

C'est Michel Halpérin l'avocat que nous avons rencontré, et interrogé sur sa vision de ce qui est à ses yeux, bien d'avantage qu'un métier : un office, un ministère.

COTE : Pouvez-vous, en introduction, nous définir le métier d'avocat et nous évoquer brièvement l'historique de cette fonction ?

M.H. Etymologiquement, le mot avocat vient du latin "ad vocatus", c'est à dire celui qui parle, qui s'exprime pour quelqu'un d'autre. Dans l'Antiquité, et c'est encore vrai aujourd'hui, l'avocat est un défenseur. Il assiste un accusé. Dans la Grèce du siècle de Périclès et de Socrate, les logographes" dirigeaient la plaidoirie de leurs clients que ces derniers lisaient ou récitaient eux-mêmes. Plus tard, à Rome, Cicéron, Hortensius, et même Jules César ont été des avocats célèbres pour la qualité de leur plaidoiries et leur talent oratoire, à l'accusation comme à la défense. Si cette activité ne s'est jamais interrompue , son étendue a varié avec le temps. L'évolution de la notion de procès équitable a considérablement accru les responsabilités de l'avocat, non seulement dans la plaidoirie proprement dite, mais dans la préparation du procès, dans sa tâche de confident et dans le développement de son secret professionnel qui est en quelque sorte la garantie d'un Etat de droit, libéral, non totalitaire, qui réserve une place privilégiée à la confidence et au secret.

Avec les temps modernes, c'est toute la place du droit dans la vie sociale qui s'étend.. Codes civils, commerciaux, droit administratif:les normes qui régissent la vie sociale se multiplient et deviennent de plus en plus complexes. Il suffit de songer à la protection de l'environnement, aux transports aériens ou à la règlementation financière. L'on comprend aussitôt que l'avocat n'est plus seulement un représentant, un porte-parole, mais aussi peut-être d'abord, un conseillé au savoir diversifié , un rédacteur de contrats et le négociateur touchant à tous les domaines  de la vie familiale ou économique.

COTE : Quelles sont selon vous les qualités qui caractérisent un bon avocat ?

M.H. : L'avocat est d'abord un juriste. Il doit donc avoir maîtrisé le savoir qu'on lui a enseigné à l'Université. Le stage puis la pratique, feront la différence. Il ne suffit pas d'appliquer selon son savoir aux problèmes que l'on vous soumet. Derrière le problème, ou plutôt devant lui, il y a une femme, il y a un homme, dont l'interrogation exprime parfois anxiété, angoisse, désarroi même souffrance. Les enjeux sont importants : relations conjugales,famille, succession, ou organisation d'une entreprise ou d'un emploi, négociations d'un contrat. Souvent, c'est la liberté même qui est en jeux , ou l'honneur. Dans tous les cas, l'avocat n'est bon que s'il maîtrise la technique et la transcende, s'il discerne outre les enjeux, les désirs profonds du client.

COTE : En son rôle ? J'imagine qu'il est multiple ...

M.H. : L'avocat prête serment à Genève, d'oeuvrer avec "conscience,, dignité, indépendance, et humanité ", il défend aussi "sans compromission" les intérêts qui lui sont confiés. Dans un procès pénal, il est le porte-parole de la victime ou de l'accusé. Il est la voix des sans-voix et le rempart contre l'injustice. Dans les affaires civiles, il est un guide, un négociateur, et un confident. Dans tous les cas, il est d'abord à l'écoute de son client. Il arrive qu'il soit pour un temps son ami d'enfance. Par une écoute attentive, il le décharge de son fardeau. La connaissance du droit et la capacité rédactionnelle feront le reste. C'est donc en effetune activité extraordinairement diverse, par laquelle, à tour de rôle, en fonction des circonstances, l'avocat est d'un coté ou d'un autre de la barre des passions humaines. Ce qui n'en fait pas pour autant  "une conscience de louange" pour reprendre le mot cruel de Dostoïevski.

COTE : La rémunération des avocats n'apparaît-elle pas parfois choquante , dès lors qu'elle n'est en principe  pas en relation avec l'issue de la cause qu'il défend ?

M.H. : Le coût de la justice, le niveau élevé des rémunérations d'avocat choquent parfois. Il fut un temps  - le XIX ème siècle - où la profession n'était constituée que de bourgeois bien nantis. Les honoraires,alors, étaient l'expression de la reconnaissance spontanée des clients . Depuis lors, les choses ont changé, en même temps que le barreau s'est démocratisé, ce qui implique que ceux qui l'exercent puissent en vivre. Et comme l'indépendance est l'une des qualités primordiales de l'avocat, il est non seulement juste, mais aussi nécessaire, qu'il bénéficie d'une situation économique suffisante  pour garantir son indépendance. Ceci dit, il n'est pas exact que la rémunération  soit indépendante  de l'issue de la cause ou de son importance. La règlementation permet souvent à un avocat , et c'est notamment vrai en Suisse, de tenir compte du résultat d'une affaire , soit en cas de succès pour en tirer lui-même un avantage, soit dans le cas contraire pour miinorer le coût de ses prestations, notamment pour tenir compte de la situation personnelle du client. Il est normal que dans une affaire ou les enjeux économiques sont très importants, les honoraires de l'avocat le soient aussi. il s'impose en contrepartie  que dans des affaires ou l'enjeux économique est modeste , une affaire de famille difficile ou un procès pénal par exemple, les honoraires soient modérés pour que prévale le principe d'humanité que j'iévoquais plus haut.

Cote Magazine  n° 22 Novembre 2008

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www.cote-magazine.ch

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