216] Le procureur général devra-t-il être réélu par le peuple l'an prochain ?

Justice 2011: faudra-t-il réélirele procureur général l’an prochain?

REFORME Le peuple pourrait être appelé aux urnes. Question d’interprétation!

MARC MOULIN

A peine reconduit pour un mandat de six ans, le procureur général pourrait devoir remettre sa tête sur le billot électoral déjà en 2010. C’est en tout cas une conséquence possible de l’harmonisation fédérale des codes de procédure, qui entre en force début 2011.

La réforme est complexe et fait l’objet d’un train de projets de loi dont le solde sera déposé demain par le gouvernement, à destination des députés. Genève doit s’adapter lourdement: le canton doit notamment fondre en une seule entité le collège des juges d’instruction avec le ministère public que dirige le procureur général, le radical Daniel Zappelli. Ils partageront dès lors leurs compétences aujourd’hui distinctes: enquête d’un côté, accusation de l’autre. Et des postes supplémentaires sont à prévoir.

Pour l’heure, le thème est à peine abordé. «A priori, il y a deux options, analyse le député libéral Olivier Jornot, membre de la commission parlementaire qui étudiera la question. On peut considérer que le ministère public actuel et son successeur élargi sont la même juridiction: dans ce cas, une élection semble nécessaire seulement pour les juges d’instruction qui la rejoignent. Mais on peut aussi dire qu’il s’agit d’une entité nouvelle, vu l’évolution de ses compétences: une élection populaire générale s’impose alors, y compris pour le procureur général.»

Constitutionnellement, tout magistrat est élu par le peuple. La loi prévoit peu d’exceptions: si un poste se libère entre deux élections, le parlement désigne des remplaçants, jusqu’à un maximum de quatre. S’il y a autant de candidats que de sièges à pourvoir, l’élection est tacite, sans recours aux urnes.

Dilemme irrésolu

«Les deux options sont tenables, mais bien des experts penchent pour la seconde, poursuit Olivier Jornot. La décision sera donc politique. Pour moi, cette transition est une révolution. Il faut des gens pour tenir la barre: on ne peut les forcer à mener en plus une campagne électorale. Sans compter que le peuple a élu Daniel Zappelli pour six ans!»

Dans son projet d’organisation judiciaire qu’il doit adopter demain, l’Exécutif penche pour la simplicité: «On évite au maximum les élections avec une liste qui fait coulisser les anciennes fonctions vers les nouvelles, révèle Frédéric Scheidegger du Département des institutions. Mais les députés trancheront!»

Le problème semble en friche. Plusieurs interlocuteurs du sérail politique et juridique confirment que la question est pertinente, mais que sa réponse n’est pas évidente. D’aucuns pressentent que le dossier, à la mode genevoise, finira au Tribunal fédéral!

Facteur d’incertitude supplémentaire, la conclusion pourrait revenir au nouveau Grand Conseil qui sera élu en octobre. Le calendrier parlementaire est serré! Olivier Jornot craint que le débat ne soit miné par les guerres de clan du Palais de justice: «L’ambiance est tendue. Les supporters de Daniel Zappelli veulent un Parquet hiérarchisé, ses détracteurs une sorte de kibboutz. Ceux-ci ne seraient pas fâchés qu’il y ait une nouvelle élection!»

source : www.tdg.ch du 07.04.2009 par Marc Moulin